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Wilfried Adingra, Directeur général de Lumen Corporation et Diaspo4Africa: «Nous démarchons avec les projets sélectionnés auprès de la diaspora pour susciter leur intérêt d’investissement.»

Wilfried Adingra est le directeur général de deux start-up à savoir Lumen Corporation, spécialisée dans l’accompagnement financier des entreprises et Diaspo4Africa, une plateforme internationale de financement participative. Dans cette interview, il nous parle du processus de souscription à cette plateforme afin d’obtenir un éventuel financement pour un entrepreneur potentiel et/ou confirmé.

Présentez-nous, SVP, Lumen Corporation.

Lumen Corporation est une société spécialisée dans l’accompagnement structurel et financier des entreprises. Pour être plus précis, nous aidons les entreprises à mieux structurer leur modèle de gestion et de revenu. Et ce, dans l’optique de mobiliser des capitaux pour renforcer  leurs activités économiques.

Vous êtes également le Directeur général de Diaspo4Africa, quel est donc le lien entre Lumen Corporation et cette plateforme ?

Tout d’abord, il faut savoir qu’au lancement de Lumen Corporation, nous avons défini une stratégie de levée de fonds qui nous permettrait d’avoir des ressources pour démarrer notre activité. Dans nos critères de mobilisation de ces fonds, nous avons visé la diaspora. Dans un premier temps, à cette époque, nous avons jugé que la diaspora était un peu plus liquide et moins exigeante que les Business Angels ou les financiers locaux. Et ceci, bien entendu, en dehors des banques et des micro-finances pour lesquelles nous n’étions pas forcément éligibles. A l’issue du succès lié à cette mobilisation de capitaux qui s’est élevée à 10 millions de FCFA pour démarrer nos activités en Côte d’Ivoire, nous avons eu des sollicitations de plusieurs personnes de la diaspora, désirant passer par le canal de Lumen Corporation, pour également financer ou investir dans des projets locaux. En quelques mois, nous avons établi le lien avec une dizaine d’entreprises et des investisseurs de la diaspora. Etant déjà dans l’accompagnement structurel et financier car sachant également chercher des solutions alternatives de financement pour les entreprises, nous avons tout de suite décelé cette opportunité. Nous nous sommes demandé par la suite pourquoi la diaspora est aussi intéressée à mener des investissements sur le continent ? Qu’est ce qui suscite cet intérêt et d’où vient tous ces capitaux qu’ils sont prêts à engager sur le continent ? C’est ainsi que dans le courant du premier semestre de l’année 2016, nous avons effectué une étude de marché qui nous a permis de comprendre que la diaspora transférait à cette époque, en moyenne 55 milliards de dollars par an. Celle-ci disposait également d’une épargne de 50 milliards de dollars. Pour comprendre l’intérêt de ces montants, il faudrait savoir que les investissements directs étrangers qui concernent essentiellement les grands bailleurs, les industriels étrangers, en tous cas ceux qui investissent sur le continent africain, atteignaient 42 milliards de dollars à cette même époque. La différence entre les investissements directs étrangers et les investissements directs de la diaspora sur le continent est tout de suite établi.

A côté de ceux-ci, il y a aussi l’aide publique au développement. Toutes ces institutions impliquées que ce soit dans le domaine de l’éducation, de la santé, de l’environnement pour ne citer que celles-là, tout ce qu’elles peuvent mobiliser pour aider le continent avoisinait 29 milliards de dollars en 2016. Ce qui signifie qu’avec simplement le financement de la diaspora, on peut contribuer au développement du continent. La seule problématique est que les investissements de la diaspora sont majoritairement orientés vers la consommation. Cette consommation est également orientée vers les industriels étrangers. Pour finir, ce financement de la diaspora retourne systématiquement un an voire deux après. Ce qui ne sert pas vraiment à notre économie.

Après ces résultats relatifs à cette étude de marché, nous avons donc compris l’opportunité de convertir une partie des ressources financières de la diaspora en fonds d’investissement. Nous avons donc invité la diaspora à prendre des participations dans des entreprises locales. De Lumen Corporation naît ainsi le programme Diaspo4Africa qui était de prime abord un de ses services. Auprès des investisseurs, un intérêt majeur a immédiatement été suscité en ce sens qu’ils ont voulu intégrer le programme. A l’issue de l’année 2018, nous avons décidé de convertir le service Diaspo4Africa en une société autonome. Une capitalisation s’élevant à 165 millions de FCFA a ainsi été effectuée pour créer cette société à statut anonyme. Le siège étant basé à la Riviera Palmeraie dans la commune de Cocody à Abidjan. L’approche ayant changé, nous avons développé un modèle économique pour cette société avec sa propre vision, sa propre stratégie et son propre mécanisme de développement. Ce qui a orchestré le lancement d’appel à projets de manière périodique afin d’aboutir à une mobilisation de ces projets qui seront présentés aux investisseurs de la diaspora. A leur tour, ceux-ci pourront prendre des participations dans ces entreprises locales. En additif,  il faut préciser qu’avant Diaspo4Africa, la diaspora menait déjà des investissements mais sans succès à cause du fait qu’il n’y avait pas de modèle de suivi efficace pour ces projets dans lesquels ils injectaient des capitaux. C’est cette garantie de suivi, d’évaluation, d’audit et de la qualité des véhicules d’investissement proposés qui sont la plus-value que notre plateforme apporte aux investisseurs de la diaspora.

Au-delà de ce lien, quelles sont les actions et / ou initiatives déjà menées ou mises en projet par Lumen Corporation afin d’accroitre la visibilité de cette plateforme de financement ?

En 2017, lorsque Diaspo4Africa était encore un service de Lumen Corporation, nous avons lancé un appel à projets. Cet appel nous a permis de mobiliser entre 200 et 300 projets. Parmi ceux-ci, nous avons sélectionné 33 viables que nous avons présentés à des investisseurs de la diaspora. Ces 33 projets étaient en cours d’accompagnement jusqu’à ce qu’on convertisse le modèle économique de la plateforme au même titre que Lumen Corporation. Une réévaluation de ces projets a ainsi été orchestrée parce qu’après un an voire deux ans, il fallait qu’ils cadrent encore avec les réalités économiques locales. Vous le savez, au fil du temps, les données collectées relativement à ces projets peuvent connaitre des changements. De façon pratique, nous les avons d’abord actualisés pour voir encore leur faisabilité. Nous les avons ensuite associés à notre nouvel appel à projets pour le début de l’année 2020. En fin de compte, ils seront circonscrits dans un programme d’accompagnement au cours de cette année. Le deuxième semestre de l’année concernera le marathon de l’investissement. Dans ce marathon, les anciens comme les nouveaux projets bénéficieront d’un financement  dans les pays où nous sommes déjà représentés. Au niveau de la Côte d’Ivoire, huit projets seront financés. Dans les autres pays en dehors du Maroc et du Sénégal qui ont le même nombre en termes d’objectifs de financement de projets pour cette année, six projets y seront financés. Dans la campagne de mobilisation des capitaux, on espère recevoir l’intérêt des investisseurs de la diaspora. Ceux-ci nous accompagneront en outre dans ces objectifs de financement de projets dans ces pays qui sont au total 12 à savoir le Maroc au niveau du Maghreb,  la Côte d’Ivoire, le Togo, le Burkina Faso, le Mali, le Benin, le Sénégal en Afrique de l’ouest, le Gabon,  le Congo (Kinshasa et Brazzaville) en Afrique centrale et enfin Madagascar et les îles Comores en Afrique de l’est. Pour le moment, nous travaillerons sur ces 12 pays qui sont exclusivement francophones. Au niveau anglophone, nous avons débuté les études de marché car nous savons que les marchés francophones et anglophones sont carrément différents. Nous avons par conséquent commencé ces études de marché au Nigéria et au Ghana. A la longue, ces études de marché nous permettront de toucher l’environnement anglophone.

Après avoir souscrit, quels sont les critères permettant à l’entrepreneur de bénéficier d’un financement éventuel?

Il faut d’abord noter que la souscription se fait en ligne sur le site web de la plateforme en suivant les instructions qui s’y trouvent. On peut le faire en tant qu’entrepreneur ou en tant qu’investisseur. Avant de parler de critères, il faut déjà parler de la répartition du capital-investissement chez Diaspo4Africa. Tous les capitaux mobilisés sont divisés en deux circuits d’investissement. 80% de ces capitaux sont destinés au capital-développement. A ce niveau, il s’agit d’entreprises déjà constituées qui ont déjà des résultats, un plan financier bien établi et des informations financières exploitables permettant de vérifier la viabilité de leur activité. A ceux-ci qui disent que nous demandons les mêmes conditions que les banques alors que nous avons des promoteurs de projet demandant un financement, nous leur répondons que nous sommes aussi rigoureux car nous travaillons avec  l’argent de la diaspora. Nous avons donc une responsabilité envers cette diaspora. Nous nous devons de leur proposer des projets extrêmement viables tout en réduisant de manière significative nos risques de perdre ces capitaux. Nous accompagnons ainsi les entreprises formalisées ou pas encore totalement mais qui génèrent des résultats. En capital risque, nous accompagnons les startups, les projets en démarrage en leur accordant 20% des capitaux investis par la diaspora. A notre niveau, les porteurs de projet ont plus de chance de bénéficier de ces financements lorsqu’ils ont déjà démarré leurs activités. Nous vérifions la viabilité de leurs projets. Cette viabilité s’évalue à deux niveaux. Localement dans le pays où nous sommes représentés, nous avons une équipe qui effectue un premier niveau d’évaluation et le second niveau d’évaluation se fait au niveau du bureau central de la plateforme. Après toutes ces évaluations, nous rendons ce projet disponible sur la plateforme. L’un des critères déterminants est surtout la qualité du promoteur de projet. Aujourd’hui, il est quand même difficile d’identifier un individu en Afrique, mais si nous avons une relation étroite de confiance avec les promoteurs de projets, et si leurs projets sont viables, cela renforce le climat de confiance nous permettant de valider ces projets sur la plateforme. Le promoteur doit s’assurer de nous donner toutes les informations utiles pour être identifié suffisamment afin que son projet soit validé sur notre plateforme.

A ce stade, est-il possible de faire un bilan sommaire par rapport à cette plateforme ?

Il est possible de faire un bilan mais en termes stratégiques. En effet, nous sommes déjà bien partis avec des partenaires internationaux. Nous avons lancé deux global angels for Africa qui sont des clubs de non-Africains désirant aussi investir en Afrique. Nous les avons ouverts respectivement en Espagne et en France. Nous avons ainsi une capacité d’investissement vraiment importante. Dans le plan stratégique de la plateforme, nous avons aussi ce que nous appelons L’Albatros venture program (Avp) qui consiste en un partenariat avec des institutions financières, des grands groupes, des fondations ou tout autre organisation désireuse de mener des investissements sur le continent Africain. Nous avons par ailleurs pu démarcher des capitaux importants avec la fondation Salvador solaire qui est un de nos partenaires quasiment connu de tous pour accompagner les entrepreneurs locaux dans le courant de l’année 2020. De façon stratégique, nous avons assis des bases solides qui devraient nous permettre de développer le programme. Dans les 12 pays, les équipes ont aussi les compétences techniques pour accompagner aussi bien en amont qu’en aval le processus de sélection, de validation, de suivi et d’évaluation de ces projets. Appelés Country diaspora ambassadors (Cda), nos représentants diaspora dans ces 12 pays sont des ambassadeurs qui mobilisent des investissements auprès de leur diaspora pour leur pays d’origine. Stratégiquement, l’écosystème de développement de la plateforme est bien établi pour que les investissements qui se feront dans le courant de cette année 2020 soient effectifs et surtout rentables.

Jusqu’à présent, combien de souscripteurs ont été déjà enregistré sur la plateforme ?

A l’heure actuelle, nous avons quasiment 2 600 souscripteurs sur la plateforme. En cours de soumission, nous avons plus de 200 projets mais nous tenons à préciser que cette forte croissance d’utilisateurs sur notre plateforme nous amène à en améliorer davantage les services digitaux vu que la demande est de plus en plus forte. Ce qui entraine une légère lenteur sur cette plateforme. Nous avons décidé d’étendre la période d’appel à projets et de faciliter la soumission à travers d’autres formats comme Google form par exemple. Ce format sera disponible afin de rendre aisé la collecte de ces projets. Juste le temps d’améliorer digitalement la soumission sur la plateforme.

Au niveau de ces souscripteurs, lesquels ont déjà bénéficié d’un financement ?

Les 33 projets mentionnés plus haut sont déjà pris en compte pour l’année 2020. Ces projets seront accompagnés dans le courant de cette année. Pour les projets en cours d’exécution, nous avons un projet de culture hors sol qui est en phase de financement. Au Benin, nous avons déjà octroyé, au travers du partenariat Avp, un financement dans la ville de Nikki pour un incubateur de femmes en zone rurale engagées dans les petits métiers comme la couture, l’artisanat et la coiffure. Et après, ce centre d’incubation qui a un modèle économique assez intéressant les aidera à s’externaliser et à ouvrir  d’autres projets. Toujours dans la même ville de Nikki, nous avons accompagné un projet de développement qui consiste en l’octroi de panneaux solaires pour les villes environnantes où l’accès à l’électricité est assez difficile. Hormis ces trois projets, nous allons continuer dans cette dynamique en vue de l’atteinte des objectifs de financement que je vous ai déjà signifié à savoir huit projets en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Maroc et six projets pour les autres pays où nous sommes représentés.

Au-delà de ces financements octroyés, comment s’effectuera l’accompagnement des entrepreneurs en ce qui concerne la réalisation de leurs projets ?

A ce sujet, nous aurons un accompagnement technique et financier. De façon continue, l’accompagnement technique consistera en un renforcement des capacités des promoteurs de projet. Et ce, dans l’optique de nous assurer qu’ils ont les compétences nécessaires pour le développement de leurs projets. Nous les assisterons dans les défis de gestion auxquels ils font face au quotidien. Pour l’accompagnement financier, nous avons un mécanisme d’évaluation nous permettant de savoir, de façon très pointue, les aspects financiers en termes de résultats. Nous ferons une évaluation de procédé et de résultats. L’évaluation de procédé concernera le mécanisme de gestion et l’évaluation de résultat concernera les performances financières. Nous avons des outils financiers et de gestion déjà établis nous permettant de collecter des informations régulières avec ces promoteurs de projet. Nous avons ainsi la possibilité de faire une assistance continue de leurs activités. Au bout d’un an, après cette assistance, nous rendons le promoteur et l’investisseur autonomes dans leurs relations mais dans notre modèle économique, nous avons toujours une partie prise dans chaque projet que nous assistons. Nous avons ce regard un peu lointain pour savoir comment ils évoluent car nous nous sentons aussi responsables de tous les projets que nous accompagnons.

Pour revenir à Lumen Corporation, quelles sont vos perspectives pour les années à venir ?

Au niveau de Lumen Corporation comme pour Diaspo4Africa, nous avons un service local appelé Pro invest+ qui consiste à capitaliser sur l’épargne des salariés du secteur public comme du privé ainsi que des entrepreneurs afin de prendre des participations dans les entreprises locales. Pro invest+ se développe assez bien en tant que service financier de Lumen Corporation avec un portefeuille client atteignant plus de 200 personnes à la date d’aujourd’hui. Avec ce service, nous pensons révolutionner et rendre plus démocratique  l’investissement en Côte d’Ivoire. C’est vrai qu’il est utopique de penser qu’un salarié touchant à peine 150.000 Fcfa puisse prendre des participations dans ces entreprises mais nous l’avons fait ! Avec les mécanismes que nous avons mis en place, nous avons démocratisé suffisamment l’investissement tant au niveau local qu’international. Ce service comprend trois véhicules d’investissement à savoir les small business program qui consistent à prendre des participations dans des petites entreprises ou des startups. Les common project investment program qui est un projet unique développé chaque année à travers lequel nous rassemblons l’ensemble de nos investisseurs pour développer un projet commun. Ce projet pourra s’illustrer dans l’immobilier, le transport, dans l’agriculture et dans tout autre secteur d’activités pouvant intéresser nos investisseurs suite à la convention annuelle des salariés investisseurs. Enfin, le troisième véhicule est le marché financier de la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm) d’Abidjan. Nous avons un partenariat avec Cyrus capital qui est une Société de gestion et d’intermédiation (Sgi) avec qui nous aidons nos investisseurs à prendre des actions sur le marché financier.

Interview réalisée par Jean-Paul DEMOUSS

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