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Ameublement: Des pneus transformés en mobiliers de maison au Mali

Récupérer des pneus usés afin de les transformer en mobiliers de maison, telle est la spécialité de l’entreprise By’recycl. Fondée par Coumba Diakité, une jeune entrepreneure d’origine malienne, cette entreprise recycle en moyenne une cinquantaine de pneus par mois.

Les fauteuils sont fabriqués grâce au recyclage des pneus usés (Photo : DR)

Les pneus sont généralement transformés en fauteuils, poufs, meubles de rangement et tables. Pour leur fabrication, l’entrepreneure vérifie d’abord que le niveau d’usure des pneus en fera encore de bons socles de base car trop éclatés, ces pneus ne pourront pas être travaillés. Elle les toilette par la suite avant de les mesurer pour savoir quel diamètre de structure en bois sera nécessaire afin de les habiller. Dans sa tâche, l’entrepreneure bénéficie de l’aide de plusieurs menuisiers, ce qui répresente pour elle une modeste contribution à l’employabilité des jeunes. « Je travaille avec quatre menuisiers et suis très fière d’avoir créé des emplois à Bamako », révèle-t-elle. Quant à sa clientèle, elle est principalement constituée d’hôtels et d’entreprises. Une liste de partenaire qu’elle compte allonger plus tard. En effet, Coumba Diakité souhaiterait étoffer davantage son carnet de commandes. Pour ce faire, elle mise sur son statut de membre du groupe des 54 femmes distinguées en 2019 par le forum Women in Africa (Wia) pour élargir son activité. Au sujet de son parcours, rien ne la prédestinait à évoluer dans cette activité.

Une informaticienne reconvertie

En 2012, rentrée de Tunisie avec une licence d’informatique et gestion, Coumba Diakité décroche un emploi salarié temporaire avant de se marier. Si jusque-là, cette jeune informaticienne de formation est restée dans la droite ligne de la volonté de ses parents qui était d’être une employée en col blanc dans un bureau climatisée, elle commence désormais à nourrir peu à peu l’idée d’entreprendre en affaires. Pendant sa première grossesse, elle arpente ainsi le premier chemin de traverse en s’ouvrant à l’environnement. Nourrissant l’envie de réduire significativement la pollution par les pneus dans son pays, elle s’inscrit donc à un Mooc (cours en ligne ouverts à tous) de l’université de Laval, au Québec. Durant ces cours sur les enjeux du développement durable, elle y apprend progressivement à recycler les pneus. Sa formation achevée, elle entame sa petite activité à Bamako, la capitale du Mali. En plus de la naissance de son bébé, cette formation agit comme un révélateur et lui donne envie de changer son environnement direct. Pour son pays, il fallait apporter une solution innovante et durable aux différents problèmes de gestion des déchets. « Franchement, comment aurais-je pu continuer à supporter qu’on brûle les déchets autour de moi au risque d’empoisonner tout le monde ? Comment peut-on laisser polluer cet air qu’on respire tous, sans rien dire ? Comment peut-on détruire ainsi la planète qu’on laissera à nos enfants ? », Se questionne-t-elle.

Une activiste de l’environnement

Toutes ses préoccupations à l’esprit, la jeune maman sait qu’elle a trouvé sa voie. Consciente que le gouvernement malien ne peut pas tout faire et que chaque citoyen doit aussi se battre contre le non-retraitement des déchets, elle s’investit corps et âme dans la lutte contre la dégradation de l’environnement. L’ambition étant par ailleurs d’aller au-delà des frontières de son pays. « Je commence à travailler sur ma ville et mon pays, mais je sais que l’enjeu est plus large et que mes réponses pourront ensuite s’appliquer ailleurs », indique-t-elle. Au Mali, seuls 25 % des déchets sont retraités. Il n’y a pas encore de politique globale, même si le gouvernement, aidé par la Banque mondiale, a investi 6 milliards de francs CFA (9,14 millions d’euros) pour créer une décharge finale moderne. Mais le chemin à parcourir avant son ouverture reste long et semé de mille embûches. En attendant, les rebuts s’accumulent toujours dans les rues de la tentaculaire ville de Bamako où vivent déjà plus de 2,5 millions de personnes sur un total de 18,54 millions de Maliens. De ce constat,  ne pouvant tout attaquer à la fois, l’entrepreneure décide de procéder par élimination. Elle s’arrête sur ces vieux pneus omniprésents qui polluent non seulement les paysages urbains lorsqu’ils sont abandonnés, mais aussi l’air lorsqu’ils sont brûlés. Ces rebuts sont souvent le fait des nombreuses sociétés minières qui utilisent beaucoup de matériel de travaux aux larges roues, avec par ricochet, la pollution due au plastique contenu dans leurs pneus. « Comme ce sont des objets constitués de 80 % de plastique, il faut compter cinq cents ans pour qu’ils se dégradent », rappelle-t-elle. Dans la maturation de son projet, cette statistique n’a pas été pour rien car celle-ci la doucement guidée vers l’idée que l’élasticité du produit en ferait des salons très confortables. Début 2018, son concept est fin prêt ! Elle lance ainsi l’entreprise By’Recycl pour offrir une nouvelle vie à ces masses caoutchouteuses après une radicale mise en beauté dans son atelier. Hier, la jeune femme qui détournait les yeux de ces détritus, les cherche désormais. Quand le pneu arrive chez elle, elle adore le requinquer en vue de satisfaire au mieux les commandes de ses différents clients.

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Si les commandes ne se bousculent pas, quelques-uns de ses produits ont déjà quand même été vendus dans des entreprises et des hôtels. Avec le forum Women in Africa (WIA), elle espère faire prospérer davantage son activité. « Je suis désormais prête à passer à la dimension supérieure car c’est nécessaire. L’économie circulaire est l’une des clés pour sauver la planète. Ce n’est pas en dilapidant les matières premières qu’on parviendra à faire cohabiter 9 milliards d’humains bientôt. Il ne faut plus jeter mais transformer les objets usagés », milite-t-elle. Cependant, Coumba Diakité sent parfois encore le doute planer autour de son activité. « J’aime l’idée d’entreprendre. Mon mari l’accepte très bien aussi, mais je sais que c’est parce que j’ai fait les choses dans l’ordre : en me mariant d’abord et en ayant deux enfants avant de monter mon affaire. Pourtant, j’entends encore autour de moi des personnes dubitatives, pour qui je devrais avoir un emploi salarié. Cela reste la norme dans beaucoup d’esprits masculins. Plus encore parce que je suis diplômée de l’enseignement supérieur », regrette-t-elle. Au fil des ans, ce regret pèse finalement peu car elle a surtout appris le discernement tout en étant persuadée qu’il faut savoir faire mentir la tradition parfois. Pour en revenir à son activité, en plus de l’agrandir, cette ardente militante de l’environnement et du développement durable projette également de revaloriser les déchets organiques en compost. A long terme, faire de la revalorisation de ces déchets une industrie produisant des énergies renouvelables pour son pays et au-delà.

Jean-Paul DEMOUSS

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